Grand Témoin
Benoît Meyronin, Directeur Conseil & Stratégie chez Korus et professeur à EM Grenoble
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La symétrie des attentions
Professeur à l’école de management de Grenoble, docteur en sciences économiques, directeur conseil & stratégie du groupe Korus et auteur de nombreux ouvrages sur le management, le marketing des services ou encore l’expérience client, Benoît Meyronin a contribué à faire émerger le concept de symétrie des attentions.
Notion apparue dans les années 2006-2007 dans le secteur de l’hôtellerie, cette logique de réciprocité des attentions prend plus que jamais sens dans le contexte pandémique actuel.
La symétrie des attentions, quesaco ?
La notion de symétrie des attentions est l’un des leviers permettant à l’entreprise d’être au rendez-vous de l’accueil client. Benoît Meyronin explique qu’il s’agit en effet de mettre au diapason les exigences que la marque peut avoir vis-à-vis de ses clients et de ses voyageurs, avec la qualité du travail managérial qui doit être fait auprès des équipes. Ces derniers doivent par conséquent à leurs équipes la même qualité d’attention et de relation que celle qu’ils réservent à leurs clients. Ce postulat s’est largement diffusé dans la plupart des métiers. Des entreprises comme Leroy Merlin ou Michelin avaient déjà fait entrer depuis plusieurs années la symétrie des attentions dans leur culture d’entreprise, sans pour autant la nommer.
Partant du principe que la qualité de l’expérience client dépend de la qualité de l’expérience collaborateur, certaines marques tendent aujourd’hui à réinvestir le terrain du management. L’exemplarité des dirigeants transpire en effet à travers toute l’entreprise avant d’être perceptible par le client.
“La symétrie doit exister dans toutes les composantes de l’entreprise. La culture du client ou du service est l’affaire de tous.”
Crise pandémique et symétrie des attentions : frein ou accélérateur ?
Dans le contexte actuel, il est légitime de se demander si la pandémie a accéléré ou au contraire freiné la diffusion de la notion de symétrie des attentions. Avant d’en venir aux conséquences de la crise sanitaire et économique sur l’application du principe par les entreprises, Benoît Meyronin fait le point sur la réception globale du concept avant l’apparition de la Covid 19. Si la notion de symétrie a convaincu de nombreuses entreprises, la mise en œuvre en est toutefois à ses premiers pas. La concrétisation reste en effet difficile, car l’on touche au cœur de la culture d’une entreprise.
La réception de la notion de symétrie des attentions n’en étant encore qu’à ses débuts, qu’en est-il dans un contexte de crise pandémique qui entraîne de nombreux licenciements ? Peut-on craindre une dégradation de la qualité de service ? Benoît Meyronin recommande de prendre d’autant plus soin de ces derniers et des collaborateurs. Ceci est d’autant plus vrai dès lors que certaines entreprises sont dans des situations délicates et que les collaborateurs sont moins nombreux pour accueillir les clients.
“La qualité de prise en charge du client sera en effet un véritable avantage différenciant dans un cadre de plus en plus concurrentiel.”
La crise sanitaire ne peut être dissociée du développement du télétravail et de la visioconférence. Si d’aucuns auraient pu craindre que ces nouveaux modes d’organisation du travail aient un impact sur la symétrie, Benoît Meyronin se veut rassurant. Il considère en effet que l’écran laisse passer la sincérité, le charisme et la disponibilité de l’interlocuteur à travers ses yeux, sa posture et sa voix. L’empathie et le professionnalisme seraient alors perceptibles malgré la distance physique. La symétrie des attentions a donc une raison d’être,même dans le cadre d’une expérience digitale, quels que soient le canal de communication et la manière d’interagir.
La symétrie des attentions et l’éthique du care
Benoît Meyronin a contribué au développement d’une vision systémique du concept autour de la notion de care. La symétrie des attentions est alors replacée dans un cadre plus large, qui est celui du management par le care et plus largement encore de l’éthique du care. Dans le secteur du voyage d’affaires, il est de plus en plus question de duty of care, du devoir de protection des entreprises vis-à-vis du collaborateur et également du bien-être du voyageur. Auparavant, cette notion relevait néanmoins davantage de l’effet d’annonce ou du marketing que d’une réalité. Aujourd’hui, la crise pandémique semble avoir favorisé la “bienveillance” des entreprises à l’égard des collaborateurs. Le principe de réciprocité est important, affirme Benoît Meyronin et la notion de care apporte beaucoup. Elle vient en effet compléter, enrichir et prolonger la symétrie des attentions.
“Si l’époque véhicule de fortes tensions, c’est aussi le bon moment pour réinvestir et réaffirmer le devoir de protection des collaborateurs.”
Benoît Meyronin conclut sur la possibilité de relier care et RSE. Il s’agit en effet d’une manière d’enrichir certaines questions managériales. La RSE gagnerait à se nourrir de cette forme d’éthique qui a 40 ans d’existence aux États-Unis. Si l’environnement ou l’économie sont importants, l’humain est le premier élément dont il faut prendre soin.